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Chroniques salmantines 2024 : Mardi

MARDI



Hier soir, après avoir suivi une séance de travail théorique, les toreros avaient eu la chance que le Maestro Leal fasse une démonstration avec son costume de lumières d'entraînement de la manière dont on revêt la cape de paseo. Tout le monde était très attentif, y compris les adultes, qui n'en perdaient pas une miette, non pas qu'ils auraient eu un jour l'occasion d'en porter une, mais conscients de la chance d'assister à un moment réservé aux seuls toreros. Baptiste, qui faisait fonction de mannequin, était lui aussi très attentif car son rendez-vous à Alès en mai prochain commençait déjà à lui mettre la pression.
 
 Le repas qui suivit avait été l'occasion pour nous de nous retrouver tous avec le Maestro Leal et d'écouter Éric nous raconter des histoires incroyables sur les fauves et les grands numéros de dressage les plus fameux du monde.
 
Les jeunes, comme à chaque édition, avaient envoyé, en guise de bizutage, Sofian pour demander l'autorisation de se lever de table au Maestro Le Sur, ça les amusait beaucoup.
 
Les maestros avaient l'intention de faire travailler ce petit groupe de façon quasi permanente car il n'y avait aucune autre possibilité d'atteindre des objectifs ambitieux qu'en travaillant sans cesse pour s'améliorer.
 
L'opportunité d'un tel entraînement intensif était bien celle-là, en 7 jours profiter de n'avoir que cela en tête même si, comme on le sait bien, il faut avoir le toreo en tête tout le temps, être "un malade des toros" comme dirait notre cher Frédéric Pastor, qui lui aussi, comme il lui plaît de l'avouer, est bien "touché" dans le domaine !
 
Le programme de mardi était très soutenu : entraînement physique, toreo de salon, révision théorique avec, au menu, les encastes. Avec le Maestro Leal, ils allaient en avoir du toro et il faudrait retenir tout ça car en fin de stage il y aurait interro !
 
 

Chroniques salmantines 2024 : Mardi
Dès 8h30, les 2 maestros avaient fait un point sur les questions, les thèmes à aborder, c'était studieux. Je me disais que ces jeunes avaient bien de la chance qu'on leur consacrât autant d'énergie et d'attention. Bien sûr qu'ils n'en étaient pas conscients car à leur âge on ne s'en rend jamais compte, mais j'aurais aimé les voir plus volontaires et démontrant plus d'envie dans les ruedos, ce que je ne voyais pas vraiment.
 
Malheureusement, l'époque que nous vivions ne préparait plus personne à avoir une activité dans laquelle il faut passer tant d'épreuves et de souffrances sans garantie de réussite.
 
Depuis toutes ces années, je voyais des jeunes défiler, dont certains sont allés jusqu'à prendre l'alternative, tous très agréables, bien élevés, mais je n'avais que rarement rencontré des jeunes autonomes, acharnés dans leur préparation et conscients qu'ils étaient dans une activité ultra sélective. D'ailleurs, même au niveau professionnel, combien de jeunes matadores avions-nous vu devenir à la mode le temps de deux voire trois temporadas et retomber dans l'anonymat, une fois que la rumeur s'était tue.  
Même dans ce domaine, nous étions tombés dans la société de consommation...de la quantité, du toujours plus nouveau, en oubliant, le fond, la qualité, la personnalité.
C'était ça le plus difficile à faire comprendre aux jeunes car cela ne s'apprend pas, dans aucune école. Les structures d'enseignement ne transmettent que la technique, le règlement, l'étiquette, tout le bagage nécessaire. Dans le même temps, chacun doit découvrir sa propre personnalité, car on torée comme on est, intrinsèquement.
Qui suis-je, qu'est-ce-que je veux exprimer, pourquoi je me retrouve là ? Quelle est ma place ? Ce sont les questions que chaque artiste doit nécessairement se poser pour trouver sa voie. Au risque, sinon, de ne jamais trouver la sienne et son expression. Une véritable auto-analyse, qui rendait la tauromachie si passionnante par le nombre de possibilités qu'elle pouvait offrir à chacun de se réaliser pleinement.
 
Pendant ce temps, les accompagnateurs s'étaient accordé une excursion à Salamanca, ils le méritaient bien, eux qui avaient passé la journée de dimanche à conduire les jeunes à destination. Nous étions à 14 minutes du centre-ville, il ne fallait pas hésiter.
 
Pendant que les séances physiques du Maestro Leal se déroulaient, Marc avait travaillé avec le Maestro Le Sur pour visionner les passages de l'entraînement de la veille pour illustrer la séance de débriefing de ce soir. Il n'y avait pas plus crue que l'image gravée qui laissait tout apparaître, le bon comme le moins bon, les défauts et surtout les corrections à apporter. Car, pour certains qui restaient satisfaits de leur performance, l'épreuve de l'image racontait une tout autre histoire. On se pensait toujours mieux que l'on était, finalement. On se pardonnait toujours plus que ne pouvait le faire une caméra.
 
Cet après-midi, la partie se compliquait car la tienta à la ganadería Fraile, c'était toujours un peu impressionnant par le volume du bétail et son mental. Hier, les vaches suaves et petites de la première tienta avaient permis que tous puissent mettre les compteurs à zéro. Dès aujourd'hui, il allait falloir sans arrêt corriger, progresser, changer le "chip" comme aiment à le dire les espagnols. La temporada allait débuter, les engagements étaient pour certains déjà pris et d'autres allaient venir, il fallait en être dignes.
 
L'hôtel était calme en fin de matinée, le rush du petit déjeuner était passé. Dans cet environnement si accueillant, on ne pouvait imaginer être sur une aire d'autoroute ! Pourtant c'était bien le cas. Ana avait su mettre une ambiance chaleureuse, dans cette zone où se croisaient tous les semi-remorques en route pour le Portugal si proche. De plus, son amour de Saint Domingue mettait une ambiance sonore quasi tropicale, tranchant avec la zone rurale dans laquelle nous nous trouvions. Cela m'amusait assez.
 
En France, de plus en plus de rumeurs de blocages paysans nous venaient aux oreilles, à l'approche du Salon de l'Agriculture le weekend prochain. Beaucoup de changements radicaux s'opéraient en ce moment. Nous étions au seuil de révolutions techniques, scientifiques et forcément sociales immenses et n'en étions quasiment pas conscients. Cela rendait la tauromachie à la fois si désuète et si nécessaire pour ne pas tomber dans la folie digitale dans laquelle on voulait nous plonger à chaque instant.
 
 
 

Sur le chemin de Robliza de cojos, le Maestro Leal continuait à prendre des notes, il ne lâchait pas l'affaire, les jeunes allaient devoir faire preuve de concentration et d'assiduité.
 
Arrivée 15h30. Ici, c'est typique, premier travail, il faut d'abord attraper le cheval de picador. Tout le monde s'y met, en rang, pour arriver à canaliser un des 3 chevaux possibles, au bout d'un petit quart d'heure, c'est bon. Puis, il faut le harnacher, lui mettre son peto. Les jeunes aident, ça leur apprend quelque chose de plus.
 
Cette année, le temps est plus que printanier, un soleil chaud, pas de vent. Nous avions passé un froid antarctique l'an dernier à la même époque. Pourvu que ça dure !  
 
15h53, il faut attendre que le ganadero, Juan-Luis, revienne pour débuter la séance de coiffeur.
 
Alors, une douzaine de jeunes apprentis espagnols arrivent, car nous allons partager le ruedo avec eux, pour une tienta de 4 vaches pour nous et deux pour eux.
 
16h10, rien... patience. Sieste pour nous les accompagnateurs, ou rêverie dans les environs. Les jeunes sont prêts, eux aussi attendent. On le sait, dans un moment, tout va s'accélérer, il faudra démarrer avec autant d'ardeur qu'ils en ont eu à ne rien faire ! C'est comme ça...
 
J'entame une petite sieste dans la voiture, une portière ouverte et je suis visitée par un beau berger d'Anatolie, très imposant mais très câlin. Quelques « reniflettes », puis, des lichettes et des gratouilles. Puis, il s'en va fureter ailleurs. Je me rendors.
 
16h35 Juan-Luis apparaît, son carnet sous le bras, l'espace-temps va se resserrer !
Il est un peu survolté, ça s'agite sur les toriles, bruits de portes métalliques, ah,ah,ah,youp, youp, huuuu, ça se précise, sinon, on risque de terminer à la bougie !
 
16h45, on commence juste l'afeitado, autrement dit, ça va terminer de nuit...le jour tombe dans 1h45. Dans le ruedo attendent maintenant une quinzaine de toreros.
 
16h49 "Quand vous voulez on commence !". On est tous d'accord. Pendant ce temps, le maestro Leal fait du rabotage de pitons.
 
1ere vache, noire, haute, mobile, pour un novillero en piquée.
Et là débute le concert de Juan-Luis qui tente d'arrêter la vache en tapant sur les montants en alu des baies vitrées coulissantes de la tribune. C’est « non sense » !
 17h13 fin de la 1ère vache
 
 
17h16 : 2ème vache, pour les toreros français.
Jolie, noire, Valentin au placement de la vache au cheval au centre, elle y va tout de suite.
Puis Baptiste,
Valentín à la muleta, deux bonnes séries mais ça ne dure pas, puis sur les conseils du maestro Leal, une bonne série à droite, mais les terrains sont compliqués à trouver pour lui, c'est pourtant fondamental. Il enchaine les séries, ce n’est pas trop mal.
Simon sort. Il tente quelques passes, ça lui coûte, les fesses sont en arrière mais il fait l'effort.
Sacha. Courageux car la vache n'a plus rien. Il s'accroche pourtant, une passe bien puis la seconde très compliquée. Sortie par Sacha 17h37
 
 

17h41 3ème vache
Rémy sort mais ne sait pas parer la vache, il évite 3 fois de se faire accrocher violemment. Le Maestro Leal se charge du placement. Rémy la sort très bien du cheval malgré l'émotion.
Valentín Au placement.
La vache s'encastre lourdement et franchement dans le peto du cheval. Baptiste la sort, bien !
Re-Rémy. Il retourne au burladero, le novillero espagnol lui prodigue un conseil. C’est sympa.
 
Rémy à la muleta. Très élégant, très efficace. Il temple très bien, il ne se fait  jamais toucher la muleta.
La vache est excellente.
Mais elle l'entraîne vers une querencia et malheureusement, Rémy, comme tous les autres élèves d'ailleurs, ne sent pas les terrains.
 
Ni ils ne les comprennent ni ils ne les sentent !
 
Sacha de retour. Il essaie des redondos mais c'est pas facile pour lui. Il s'accroche.
18h08, la vache ne veut pas sortir !
Les toreros espagnols l'attendent dehors pour continuer à la toréer a campo abierto.
18h09, elle sort.
 
18h11 4ème vache. Les toreros espagnols espèrent une aussi bonne vache.
18h37 sortie
 
5ème vache 18h40
Sacha aux manettes pour le cheval
Puis Valentin.
 
Sacha à la muleta. Toujours les terrains à trouver pour bien toréer. Il est volontaire et il s'accroche.
Quelques jolies passes sur les reins.
 
 On en aura vu des Redondos. "C'est la leçon du jour !" Me dit Jean-Yves qui a papillonné toute l'après-midi pour ne rien perdre du spectacle et qui a rejoint la tribune pour s’asseoir un peu.
 
Sofian. Il est courageux, il essaie et s'accroche.
Simon. Lui aussi y retourne.
19h05 fin de la vache.
 
Le jour est en train de tomber, le soleil s'est couché, il reste encore une vache, en théorie.
Jean-Yves me propose d'éclairer la piste avec nos portables, si on peut aider, avec Jean-Yves, nous, nous sommes là !
 
19h08 6ème vache, plus forte, plus violente, je l'avais vue dans les toriles assez agressive dès qu'on s'approchait.
 
Baptiste pour le cheval : Vache très brave au cheval.
Valentín à nouveau : la vache est très brave.
Rémy : la vache s'emploie toujours au cheval.
 
Le cheval sort du ruedo.
 
19h13 muleta pour Baptiste
La vache est très exigeante. C’est un festival.
 
De très bonnes séries à gauche et à droite malgré l’attitude enracée de la vache.
Le Maestro Leal : « Les vaches avec du tempérament, il ne faut pas les laisser reprendre du moral, il faut rester près d'elles. Laisse-lui ta muleta devant ! » dit-il.
Baptiste s’exécute et ça fonctionne.
 
Il fait de plus en plus nuit, le ganadero a allumé la lumière de la petite tribune pour prendre des notes, ça ne change rien dans le ruedo de plus en plus sombre.
19h25 Baptiste vient de rencontrer une vache exceptionnelle qui lui a beaucoup donné. J’espère qu’il s’en rend compte et qu’il s’en souviendra.
 
Simon y retourne.
 
Si les vaches étaient couleur sable, à ce moment même, nous ne les verrions plus, heureusement elles ont eu l’excellente idée d’être noires, on l’aperçoit un peu encore. Il va falloir abréger.
19h28 puerta.
 
Enhorabuena ganadero ! A demain, j’espère que l’on pourra débuter plus tôt, je n’ai pas pris ma lampe torche !


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